Critique

Critique Sandman : un OVNI parmi les rêves sur Netflix 🎃

Parfaitement millimétrée, la série Sandman rend hommage aux romans graphiques cultes de Neil Gaiman, avec une adaptation de très haut vol.

Série Sandman netflix Dream avec masque
© Netflix

Adaptée des romans graphiques de Neil Gaiman, Sandman veut s’imposer comme le prochain succès de Netflix, à l’heure où la plateforme peine à conserver ses abonnés. Centrée sur les aventures du roi des rêves Morpheus, cette nouvelle saga épique ouvre la voie à un véritable univers étendu, qui pourrait bien faire la force du N rouge dans les années à venir. Fidèle à l’œuvre originale dans ses forces comme dans ses faiblesses, la série nous a-t-elle fait rêver ? Critique.

Encore une adaptation comics

Sur petit écran, les adaptations comics ne manquent pas. Ces dernières années, les plateformes de SVOD ont investi dans tous les registres possibles pour retranscrire sur petit écran les plus grands succès du neuvième art. On pense évidemment aux superproductions Marvel, qui ont désormais une place de choix sur Disney+, mais aussi à Locke & Key, ou encore The Boys sur Amazon Prime Video. Huit ans après son officialisation, l’adaptation de Sandman ne déroge pas à la règle.

Série Sandman netflix Dream
© Netflix

Publiée entre 1989 et 1996, Sandman compte parmi les œuvres fondatrices de la bande dessinée américaine moderne. Le roman graphique de Neil Gaiman est paru en France dans une intégrale en sept volumes (et un spin-off) chez Urban Comics, et brille autant par son style avant-gardiste que par sa taille. Après l’adaptation des excellents American Gods et Good Omens sur Amazon Prime Video, Neil Gaiman change de crèmerie, et signe cette fois avec Netflix pour mettre en image son œuvre la plus monumentale. Cette fois encore, l’auteur prend part au projet, en signant le scénario de cette première salve d’épisodes, en collaboration avec le showrunner Allan Heinberg, et David S. Goyer, déjà à l’œuvre sur la série Constantine en 2014.

Dans la série Netflix comme dans les comics, Sandman se concentre sur les aventures du seigneur des rêves Morpheus. Emprisonné par erreur par Roderick Burgess, un magicien noir en quête d’immortalité, l’Éternel va passer près d’un siècle en captivité avant de réussir à s’échapper. Mais le retour du roi ne se passera pas comme prévu : en plus de 70 ans, le royaume des rêves a changé. Morpheus doit mettre de l’ordre dans son monde avant de partir à la poursuite de ses attributs de pouvoirs, dérobés pendant sa détention. Sur son chemin, le marchand de sable devra affronter de puissants ennemis qui rêvent de le détruire, et reprendre sa place au sein de son propre royaume.

Le plus décousu des rêves

La série Sandman ne fait pas dans l’interprétation libre : pour cette première salve d’épisodes, Netflix s’attache à retranscrire fidèlement l’œuvre de Neil Gaiman. Les lecteurs et lectrices ne s’y tromperont pas, la quasi-totalité des épisodes reprend les titres des chapitres du premier roman graphique. Seules les mentions directes à DC Comics semblent avoir été supprimées. Le Martien, Batman, et même le personnage de John Constantine répondent aux abonnés absents. L’accord entre Warner et Netflix ne porte visiblement que sur l’univers créé par Neil Gaiman, et cela vaut aussi pour les personnages.

Série Sandman netflix Johanna Constantine
© Netflix

Comme l’était Good Omens dans son genre, Sandman est un OVNI dans le paysage sériel, trop souvent formaté par les considérations financières des plateformes. Très sombre, tant dans son propos que son traitement graphique, la narration de de la série offre une expérience de visionnage onirique et décousue, à la limite de l’abstrait. Chaque épisode flirte avec les frontières de l’étrange, au point qu’on a parfois l’impression que cette première saison ne fait qu’accumuler les arcs indépendants. La plupart des chapitres finissent par se recroiser, le temps d’un rêve ou d’un cauchemar, mais plusieurs restent privés de leur conclusion, comme c’est le cas de celui consacré à Robert Gadling. Qu’il s’agisse de Roderick Burgess, de Constantine ou encore de Rose Walker, chaque intrigue est l’occasion de rappeler l’omniprésence du seigneur des rêves, mais aussi sa faculté à traverser les générations humaines.

Série Sandman netflix
© Netflix

Côté photographie aussi, le travail d’Allan Heinberg est à saluer. L’univers dépeint par Neil Gaiman a facilement tendance à verser dans la noirceur gratuite, mais oscille efficacement entre l’horreur des enfers et le charme verdoyant du royaume des rêves. Un jeu d’équilibriste entre rêve et cauchemar, dans lequel les genres s’entremêlent sans se ressembler. La bande originale elle aussi est une réussite, à commencer par la reprise par Yeezy de Mr Sandman, le tube des années 1950 qu’on pensait pourtant connaître par cœur.

Malgré une profusion d’arcs et de personnages, pas de quoi perdre le fil pour autant. La réalisation est assez efficace pour ne jamais nous perdre. Les aventures de Dream nous tiennent éveillés jusqu’à la conclusion de la saison. Il faudra cependant faire preuve de résilience, et accepter, parfois à contrecœur, que certaines questions posées dans cette première salve d’épisodes resteront sans réponse.

Dream a little dream et ses amis

Si la narration de Sandman est une réussite, c’est du côté de ses personnages que la série puise toute sa force. Les protagonistes créés par Neil Gaiman brillent par leur profondeur, et force est de constater que les nombreux choix opérés par Allan Heinberg visent juste. L’engrenage est bien huilé, et aucun grain de sable ne vient perturber la machine des rêves.

Série Sandman netflix Death
© Netflix

Comme dans les comics, la série Sandman réussit le tour de force de faire de Morpheus une figure divine, presque détachée de sa propre histoire. Si Tom Sturridge (Good Morning England) reste convaincant dans son rôle d’Éternel, il est rapidement éclipsé par l’humanité de ses sujets, à commencer par Lucienne, la bibliothécaire du monde des rêves. Netflix a fait le choix de féminiser le personnage original, et il faut bien admettre que Vivienne Acheampong s’impose comme une évidence dans son rôle. Même constat pour Jenna Coleman, qui livre une Johanna Constantine bien loin des carcans qu’on lui connaît habituellement.

Avec son casting très british, qu’on croirait tout droit sorti de Harry Potter ou de Doctor Who, Sandman livre une interprétation magique, dans un monde qui a toutes les cartes en main pour devenir une référence visuelle de la pop culture.

Série Sandman netflix Désir
© Netflix

C’est d’ailleurs toute la force de la série : les personnages sont imparfaits, et ne tombent pas dans la caricature gratuite. Qu’il s’agisse de l’égoïsme de Constantine ou de la naïveté de Rose Walker (Kyo Ra), tout le casting s’offre une profondeur rare, y compris chez les figures secondaires. Les antagonistes n’échappent pas à la règle, et livrent eux aussi des interprétations brillantes de justesse, à l’image de Boyd Holbrook dans le rôle du Corinthien, ou de David Thewlis dans celui de John Dee, prêts à tous les sacrifices pour se libérer de l’emprise de Morpheus. En jonglant entre les genres et les registres, les méchants deviennent la pierre angulaire de la série, et c’est une vraie réussite.

Seuls les personnages de Désir (Mason Alexander Park) et Désespoir (Donna Preston) manquent parfois de finesse. Les deux grands méchants de la série n’ont pas le temps de montrer toute la profondeur de leur personnage dans cette première saison, et c’est bien dommage. Pour le peu qu’on l’aperçoit, Mason Alexander Park crève l’écran dans son rôle. La saison 2 devrait heureusement lui offrir une place à la hauteur de son talent. Quitte à éclipser totalement Morpheus.

Netflix veut son Sandman Universe

À vouloir dépeindre tous les personnages de l’univers comics, la série Sandman oublie parfois qu’elle n’a que dix épisodes pour y parvenir. C’est d’ailleurs le principal défaut de cette adaptation, aussi brillante soit-elle. Malgré une construction toujours juste, certains personnages ne font qu’une brève apparition pour ensuite tomber dans l’oubli, alors qu’on aurait aimé les connaître un peu plus. La palme du genre revient à l’immortel Robert Gadling, mais c’est aussi le cas de Johanna Constantine, ainsi que du reste de la fratrie des Éternels. Désir, Mort et Désespoir se contentent de brèves apparitions, tandis que Destin, Destruction et Désir sont tout juste mentionnés.

Série Sandman netflix Corinthien
© Netflix

Sans être totalement frustrante, cette première saison est surtout l’occasion de présenter les personnages d’un lore qu’on imagine bien trop vaste pour une seule saison. Pas de doute, l’univers étendu rêvé par Netflix est bien là. La plateforme semble enfin apprendre de ses erreurs en misant sur des productions ambitieuses, qui voient un peu plus loin que la désormais traditionnelle saison pilote jamais renouvelée.

Notre avis

La fin aurait sans doute mérité un peu plus de clarté, mais cette première saison pour Sandman est une réussite sur toute la ligne. Même avec l’abandon de l’univers DC Comics, qui n’est mentionné nulle part - sans doute pour des questions d’accords entre la Warner et Netflix, la nouvelle série du N rouge parvient à s’émanciper du comics tout en lui restant très fidèle. Espérons que la prochaine saison répondra à nos interrogations, qui restent nombreuses après cette première salve d’épisodes.

L'avis du Journal du Geek :

12 Commentaires

  1. Julien

    5 août 2022 at 12:42

    Concernant pas mal de points relevés dans l’article (présence des personnages trop courtes, arcs narratifs inachevés et j’en passe), je trouve que c’est vraiment dommage que le critique n’ait pas lu le comics.
    Déjà, certains points sont faux (sandman est un récit construit sur la durée), et d’autres passent à côté de ce qui a justement fait le succès de ce comics.
    En bref, lisez le comics.

  2. Fab

    5 août 2022 at 15:29

    VOus parlez de l’abandon de de l’univers DC, cela veut dire que sur le papier ce personnage est dans le même univers que batman, superman etc…?

  3. EchoBoy

    5 août 2022 at 21:10

    Effectivement, on a vraiment l’impression que l’auteur de l’article ne connait pas vraiment le comics. La justice league est de tout façon juste mentionné dans le comics (1 vignette), le Martian Manhunter un peu + mais rien qui n’impacte l’histoire.

    Par contre, plus étonnant est la construction de la série qui couvre tout le volume 1. Elle aurait pu aisément couvrir la moitié, soit la recherche des artefacts avec comme pont d’orgue John Dee et le Diners. Et une 2ème saison sur l’arc Rose Walker et le Corinthien. Cela aurait permis d’approfondir les personnages. Là cela donne une impression d’expéditif.

    Enfin, le plus gênant à mon sens est l’absence de l’atmosphère gothique du comics. Cela fait trop édulcoré à la Netflix, j’ai l’impression de voir un énième Gricha Bones & truc. L’exemple parfait est le personnage de Death qui a été inspiré par Cinamon Hadley dans le comics et qui a l’air si générique dans cette adaptation.

  4. Objectivement impartial

    6 août 2022 at 1:24

    Une série qui avait du potentiel ! Mais sans surprise Netflix à tout gâcher avec sa sauce de wokisme et de pseudo bien pensance Et indigeste comme on nous habitus de film en film et de séries en série ces derniers temps… voir on nous gave!
    Et ces judas de journalistes Ont leur entière collaboration pour brader leur soi-disant vertus par leur manque de professionnalisme et surtout de compétences
    Amandine Jonniaux devrait être virée voire démissionner si elle avait un peu de fierté car il n’est pas acceptable que de telles personnes puissent s’exprimer sur un media en se disant être journaliste !
    Mais cela se vérifie dans un monde où la Justice existerait je suppose … je rêve de ce monde.Sandman!

  5. Loozap

    6 août 2022 at 15:51

    C’est incroyable ça

  6. Icarus

    7 août 2022 at 7:58

    oui

  7. kakal

    8 août 2022 at 13:04

    j’ai bien aimé les 3 premier épisodes mais après j’ai complétement décroché! 🙁

  8. maxxi

    8 août 2022 at 18:11

    Comme toujours ceux qui connaissent le comics trouvent cela nul, mais dites vous bien que vous êtes une toute petite minorité, donc Netflix se tape royalement de vos commentaires à la con. Comme des millions d’abonnés moi je savais même pas que le comics existait et je trouve cette série de très bonne facture.

  9. Numa

    11 août 2022 at 12:59

    Pour avoir justement écouté via audible les livres Sandman 1 et 2 qui sont très bien. Je m’y retrouve en partie mais il manque tellement de choses aussi, de détails, d’explications etc et ce qui m’a le plus surpris est le coté un peu moins “gore” de la série. Quand il aide la fille qui a sa bourse de sable, le couloir est tout gluant, dégoulinant comme des entrailles vivantes dans le livre et là c’est normal ^^
    Je rejoins une personne qui dit qu’on aurait pu faire en une saison la recherche des artefacts et dans l’autre la partie avec le corinthien et Rose Walker.
    Un peu dommage. La série est malgré tout sympa, on ne dérive pas trop quand même dans les grandes idées

  10. Pastes Oignon

    13 août 2022 at 8:38

    Ne connaissant pas le comics je ne saurais pas faire de comparaison entre ces deux support.
    Mais même sans cela, personnellement, je ne peux pas apprécié cette séries, pour moi les personnages sont des caricatures pas très bien joué (“Mort”, “Satan”, les démon, … ils ont l’air de tout sauf de choses capable d’inspirer la peur), l’histoire est décousue, les effets spéciaux sont trop cartoon (et orienté Teletubbies), finalement il n’y a que les décors qui sont par moment joli!
    J’en prend pour exemple le combat entre Sandman et Satan, c’est quoi un combat verbal ce truc ?
    Sans oublié la palme du personnage cliché : “désespoir” et évidemment que serait une bonne séries Netflix sans sont personnage, gay, trans ou non-binaire?
    Je comprend vraiment pas où ils ont voulu en venir avec cette série ?
    Ces propos n’engage que moi!

  11. Alex Verus

    17 août 2022 at 15:20

    Quel dommage! Sandman est pourtant une histoire formidable. Mais là c’est fade et soporifique. Les acteurs n’y croient pas une seconde et avancent laborieusement. Où est passé le mélange de poésie et d’horreur qui fait tout le charme de Neil Gaiman.
    Ici, ce n’est que très lourd placement produit (téléphone pliable dernier cri), transformation des personnages pour avoir une majorité de gays, lesbiennes, trans, transformation des races pour avoir toutes les couleurs (bizarrement tous les méchants sont restés des hommes blancs). Pour un amateur de l’oeuvre originale, cela devient ridicule pour ne pas dire pénible.
    Autant l’adaptation de Good Omens du même Neil Gaiman et de Terry Pratchett est une franche réussite drôle et portée par 2 excellents acteurs, autant celle-ci est un ratage complet.

  12. Al

    19 août 2022 at 22:44

    Une série avec du potentiel si on zape le wokisme a la con de Netflix.
    La Mythologie de la série est ultra intéressante, mais les passage, repassage et bourrage de crâne LGBT donne seulement une envie de gerbé.
    On vous place du gay du hétéro du lesbien, du trans en masse à telle point que les heteros en sont perdus…
    ( Où montrer comme les méchants, et oui c’ est apparament mal de ne pas faire parti de l’ une de ces minorités)
    En bref c’ est un magnifique raté

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *